Tuesday, September 26, 2006

Vae Victis n°59

Le numéro de ce bimestre du meilleur magazine de simulation historique est consacré, pour ce qui concerne le jeu de simulation, à la campagne d’Alsace de 1944 par la Rhin & Danube. La carte couvre en gros les départements du Haut-Rhin, du Territoire de Belfort et du Doubs. Côtés pions, d’un graphisme une fois encoure sublime, on note tout l’hétéroclite d’une armée française en pleine restructuration, avec des troupes coloniales (9e DIC, 2e DIM, Zouaves, Tabors), l’armée gaulliste (1e DFL), les maquisards (unités FFI de l’Yonne, d’Auvergne, de Corrèze, de Bourgogne, du Morvan…), les Corps Francs et l’armée blindée (2e et 5e DB)… Du côté allemand, même chose avec la Wehrmacht (338e VGD, 189 ID, 269 ID), la SS (la 30e division, des Ruthènes), les Osttruppen (le 60e bataillon) et même un curieux bataillon de sourds (des grenadiers apparemment) qui prouve qu’en 1944 l’Allemagne avait, pour reprendre une expression de wargamers, touché le fond du force-pool… Le dossier de ce numéro, qui va donner lieu à un jeu dans le n°60, est consacré à la guerre de Vendée. Région à forte natalité, jeune et dynamique, la Vendée sera saignée à blanc par le génocide, dont le point de départ sera la répression sauvage d’une manifestation de jeunes réfractaires le 4 mars 1793 à Cholet. L’article est assez objectif, rappelant notamment que seuls 25 % des nobles rejoignirent cette véritable insurrection populaire, mais les chefs sont de valeurs : Bonchamps et Charrette, anciens officiers, s’avèreront des tacticiens hors pairs. Il y avait autant de nobles du côté Bleu, avec notamment les généraux de la Bourdonnaye, de Biron et de Verteuil. Le manque d’unité et de mobilisation rendra hélas l’exploitation des victoires impossibles et notamment la prise de Nantes. Ce qui est par contre scandaleux, c’est que l’article met sur le même pied la bavure de Marchecoul (44 républicains exécutés au tout début de la guerre) et le génocide de 1794. Pas un mot sur Les Lucs-sur-Boulogne, une tragédie pire qu’Oradour… Décidément, les deux derniers numéros pèchent par un conformisme politique des plus ennuyeux. Cela ne gâche en rien, je le précise, la qualité extrême de cette revue.

En ce qui concerne les jeux pour figurines, notons un scénario sur la bataille d’In-Rhar (centre de l’Algérie) le 19 mars 1900 opposant la colonne du lieutenant-colonel d’Eu (9e et 10e compagnies du 1er régiment de tirailleurs algériens et 4e compagnie du 2e bataillon d’Afrique, plus le 1er escadron du 1er Spahis algérien et une section de canons de 80 mm de montagne, soit 730 hommes et 1700 chameaux) aux tribus Ksouriennes dans l’oasis du ksar Lekhal es Selfani. Le tout, comme à l’accoutumé, accompagné d’une étude sur la soumission de la région saharienne en 1900, décidée suite au massacre de la mission Flatters le 16 février 1880. Lancée en 1898, l’expédition remporte une série de victoires décisives : In-Salah le 27 décembre 1899, In-Rhar le 4 janvier 1900, Akabli le 27 mars 1900… Le Sahara est soumis en 1901, au prix de pertes terribles en animaux : 24.000 des 34.000 chameaux et mulets mobilisés meurent lors de la campagne du Touat en 1901 ! Autre scénario, la libération de Belfort le 19 novembre 1944, opposant la compagnie Métivier des Commandos d’Afrique renforcés par les chars du 6e RCA à la 189e division d’Infanterie. Pour finir, la bande-dessinée de Batisse, Ciel de Bataille, où Napoléon et son ange gardien Nelson font leur plein d’essence chez Leclerc. Philippe Leclerc.

Vae Victis n°59 – novembre/décembre 2004 – 6,95 € - en vente chez tous les marchands de journaux

Saturday, September 23, 2006

Vae Victis n°70

La livraison de septembre 2006 du bimestriel de jeux de simulation offre le traditionnel jeu en encart simulant la campagne du Tonkin de 1950-1954. La carte s’étend du Golfe du Tonkin aux villes laotiennes de Phong Saly et Luang Prabang. Au nord, la portion méridionale de la Chine et au sud, Thanh Hoa et la rivière Ma, le tout accompagné par des pions d’excellente facture comme à l’accoutumée. Côté Viet Minh, Giap et Ho Chi Minh commandent les 304e, 308e, 312e, 316e et 320e divisions, en sus des groupements indépendants VM et du Pathet Lao. Du côté Français, la crème de l’élite de l’armée, notamment de nombreuses forces parachutistes (1er et 2e bataillons étranger de parachutistes, 1er à 3e et 5e à 8e bataillons de parachutistes coloniaux, le 42e RTM… la quasi-totalité de ces unités disparaissant à Dien Bien Phu. A noter un scénario pour figurines simulant la bataille de Buron (Calvados) ayant opposé le 8 juillet 1944 la 9e brigade de la 3e division canadienne aux ordres du lieutenant-colonel Griffith au 25e régiment de Panzergrenadiers de la 12e division SS Hitlerjugend aux ordres du SS-Standartenführer Kurt Meyer, dit Panzer Meyer.

Le dossier historique évoque la campagne de Prusse de 1806 avec des parallèles historiques ignorés des Prussiens mais connus du Corse. L’armée germanique avait la réputation d’être la meilleure d’Europe, gloire gagnée à l’époque de Frédéric II. En quelques semaines, cette force auto-réputée invincible va être entièrement éradiquée par Napoléon. Persuadés que « Bonaparte n’est pas digne d’être caporal dans notre armée… et que deviendront, devant nos généraux qui ont appris la guerre dès leur jeunesse, ces tailleurs et ces savetiers improvisés généraux par la révolution ? », les Prussiens ont gardé la même tactique qu’il y a un demi-siècle. La reine Louise et son fils le prince Louis vont forcer le roi Frédéric-Guillaume III à attaquer la France. Le fiasco fut homérique : tiraillée entre les rivalités des généraux accentuées par un roi faiblard, l’armée prussienne est battue par Bernadotte à Schleiz le 9 octobre puis écrasée par Davout à Auerstadt et par Napoléon à Iéna le 14 octobre… Car Napoléon, lui, connaissait l’histoire. Il avait pressenti que la Prusse était dans la même situation de déclin qu’Athènes en –406 (armée divisée, plus de chefs compétents, intrigues de palais), avec une armée aussi sclérosée que Philippe V de Macédoine en –197 et un nombrilisme de petits seigneurs dignes des Gaulois de la guerre des Gaules. Napoléon avait analysé les erreurs du passé et allait vaincre une Prusse confite d’orgueil depuis 1755. Détail piquant, 70 ans plus tard, c’est la même Prusse modernisée et régénérée qui écrasera une France de Napoléon III trop confiante, se croyant invulnérable depuis 1859…

A noter un scénario pour ASL simulant la bataille d’Osa le 16 septembre 1944 entre la 213e brigade de chars soviétiques (équipée de chars allemands capturés) de la 18e armée et la 10e division d’infanterie de l’armée hongroise.

Vae Victis n°70 – 7,50 € - chez tous les marchands de journaux.

Vae Victis n°69

La livraison de juillet 2006 du bimestriel de jeux de simulation offre le traditionnel jeu en encart simulant les rivalités féodales en France allant de la fin des Carolingiens au début des Capétiens, très précisément du règne de Louis II le Bègue à Louis V le Fainéant. La France est divisée en 18 provinces, chacune menacée par un éventuel envahisseur (Viking, Magyars et Sarrasins). Notons que les Vikings peuvent s’approprier la Flandre et la Normandie, les Arabes la Provence (qui a dit anticipation ?) et la Gothie (le Languedoc), le Saint-Empire germanique pouvant également s’impliquer dans le conflit. L’un des joueurs joue les Carolingiens et l’autre les vassaux avides de prendre le trône.

Le dossier historique évoque la campagne du Tonkin de 1950-1954, qui s’acheva par la défaite de Dien Bien Phu qui aurait pu être une victoire à la Pyrrhus pour les communistes sans la trahison de Mendes-France : l’armée de Giap était saignée à blanc ! Commencée en 1947 avec les opérations Léa et Ceinture qui établissaient des garnisons le long de la Route Coloniale 4 (Lang Son – Cao Bang), elle faillit être couronnée de succès dès le commencement : il s’en fallut de peu que Ho Chi Minh et ses sbires soient capturés à Bac Kan. Mais l’entrée en guerre de la Chine communiste aux côtés de leurs frères idéologiques en 1949 va bouleverser la donne : la France doit évacuer 53 postes dans le Haut-Tonkin et en novembre, elle s’est repliée sur ses points fortifiés de Cao Bang, Dong Khê et That Khê. L’armée ennemie était forte de 5 divisions, sans compter les unités de partisans derrière les lignes françaises (le fameux régiment 42 notamment). En février 1950, à Nghia Do, près de Cao Bang, un bataillon para français repousse une division viet, mais le 15 septembre, alors que Cao Bang était évacuée, les communistes attaquèrent à Dong Khe avec une supériorité écrasante : 6 bataillons contre 2 compagnies. Le 6 octobre, le 1er BEP arrivé pour renforcer le dispositif était anéanti. That Khê tomba le 15, provoquant l’encerclement puis l’anéantissement du 3e BCCP (parachutistes coloniaux). Le 6 décembre 1950, le général De Lattre de Tassigny prit la direction des opérations avec son adjoint Salan, qui connaissait la région. Il décida la constitution d’une armée vietnamienne anticommuniste et de groupes mobiles. Le 17 janvier 1951, à Vinh Yen, les Français battent les 308e et 312e divisions Viet Minh. Le fils unique du général en chef, le lieutenant Bernard de Tassigny, tomba à l’ennemi le 30 mai au sein du bataillon de marche du 1er chasseur. La campagne de 1951 fut un fiasco pour Giap. L’armée vietnamienne anticommuniste étant désormais forte de 36 bataillons, Giap décida d’attaquer le pays Thaï, allié traditionnel de la France et défendu par 4 bataillons d’indigènes plus 2 bataillons de nord-africains. Nouveau fiasco : la 312e division était étrillée par les paras français. Le 10 novembre, les Français lançaient une contre-attaque, l’opération Tulipe, visant à reprendre la capitale du pays Muong, Hoa Binh. Les Français se replièrent le 25 février 1952 mais les 304e et 308e divisions Viet Minh étaient quasiment anéanties. Nouvelle victoire fin avril quand le Régiment 98 fut anéanti par les Français au Canal des Rapides.

Giap lança sa seconde offensive en pays thaï en 1952 suite à un effort intense d’espionnage par le bataillon de renseignement 426. Trois divisions communistes attaquèrent le 6e BPC du commandant Bigeard. Ce dernier resta jusqu’au bout pour sauver le 1er bataillon thaï puis parvint à rompre l’encerclement et à se replier à Son La.. Derrière les lignes ennemies, les maquisards fidèles à l’Empire se révoltent contre l’oppresseur vietnamien mais sont écrasés par la 302e division. Le 23 novembre, Giap attaque massivement à Na San et subit une cuisante défaite. La bataille s’achève le 7 décembre mais les Viets ont désormais une division d’artillerie, la 351. En 1953, les communistes agressent le Laos mais sont repoussés. Le 8 mai 1953 , le général Navarre prend le commandement et propose un plan : liquider les communistes dans le sud du pays puis y mettre les unités vietnamiennes en garnison, permettant de rassembler toutes les troupes françaises pour reconquérir le Tonkin en 1954. En novembre 1953, Dien Bien Phu fut repris par les Français et Giap décida de l’attaquer avec 4 divisions dont celle d’artillerie… La suite a déjà été racontée dans ces colonnes (Le Libre Arverne n°82). Le sacrifice de nos 17 bataillons dans la cuvette avait permis l’anéantissement de l’armée de Giap : 23000 hommes de ses troupes d’élites tués ! De plus, l’opération de pacification du sud, l’opération Aréthuse, fut un succès total. La France avait des réserves mais elle fut trahie. Ceci est une autre histoire. En fait, c’est toujours la même histoire…

A noter un scénario pour figurines simulant un combat imaginaire au Far West dans la petite ville de Living Rock, où le blanchisseur chinois Li, également éleveur de cochons (qui mangent les cadavres encombrants…), est protégé par le shérif véreux aux ordres du bistrotier Surrengen face à un bistrotier rival, James Tallybond. Le numéro comprend un petit jeu en solitaire, Operation Pedestal, simulant l’attaque en août 1942 par les germano-italiens du convoi de la dernière chance pour Malte. Le joueur est l’Axe et doit infliger un maximum de pertes aux Alliés. Notons également un scénario pour Optimus Princeps, le jeu paru dans le n°67, sur les campagnes d’Hadrien contre les Daces en 117-118.

Vae Victis n°69 – 7,50 € - chez tous les marchands de journaux.